lundi 4 mai 2015

Réflexions nocturnes...


Prendre de la cortisone à 3 heures de l'après-midi n'aura pas été malin. C'est ce qui éveille l'esprit à 2 hres du mat et génère l'insomnie. Je sais que je ne peux pas prendre de cortisone après que midi ait sonné sans en payer le prix nocturne. Enfin au moins après deux autres doses d'opiacés, la douleur est redescendue à 6/7. Ce qui est vraiment plus supportable que 8/9...

Et alors que la nuit se fait blanche, je me demande... à vous qui passez par là et connaissez la réalité de la douleur chronique. Comment est-ce que la douleur chronique vous nuit au quotidien. Professionnellement, émotionnellement, où est-ce que la douleur chronique vous fruste le plus? Où fait-elle coincer le plus votre vie?

Comme on ne peut demander aux autres s' ouvrir si on a pas les "guts" de le faire soi-même, je peux avouer que ma troisième année la douleur a été très dure sur mon couple.

Mon mari ne comprenait pas vraiment ce qui m'arrivait et quand j'ai commencé à essayer de lui expliquer, il n'arrivait pas à y croire. Il n'arrivait pas à accepter que je ne redeviendrais pas comme avant. Que cela n'en finirait plus. Obligatoirement j’exagérais.Ce que je lui expliquait ne pouvait être possible! Ce qui me frustrait à foison. Un tout qui a causé de fortes tensions en notre relation. Un couple qui fonctionnait et traversait depuis 14 ans les épreuves de la vie. La douleur chronique en bouleversait dangereusement l'harmonie...

C'est en acceptant de m'accompagner aux groupes d'entraide à l'hôpital et à mes traitements de physio avec qui il a pu discuter du problème physique qu'il a pu approfondir ses connaissances de la douleur chronique, et qu'il a finalement décidé de cheminer à mes côtés. Et de prendre, avec moi, tous les outils possibles pour en gérer au mieux la réalité. Il vient maintenant avec moi aux conférences mensuelles à l'hôpital et ça me fait un bien fou de ne pas devoir affronter seule cet apprentissage forcé.

Depuis nous retrouvons une harmonie sentimentale. La douleur chronique n'aura pas réussi à nous séparer. L'amour est encore là. L'entente est revenue. Mais ce n'est pas le cas de tous.

J'ai lu quelque part que plus de 65% des couples se séparaient lorsque qu'arrivait la douleur chronique en leur quotidien.

J'ai aussi vu des amitiés s'étirer au fil des années qui se passent en compagnie de la douleur chroniques, certaines disparaissent carrément à l'horizon. Celles là n'étaient sûrement pas assez solides pour en traverser l'obstacle.

D'autres s'éloignent par la force de la reconstruction avec la douleur. Il semble très dur pour certains d'accepter ce qui est invisible et méconnu. Mais cela n'en rend que plus précieux ceux qui restent...

Professionnellement, ma condition de pigiste me permet de pouvoir garder des contrats en attente. Mais cela reste compliqué. Un pigiste qui ne travaille pas est un pigiste sans le sou. Après 8 mois d'arrêt complet, je reprends enfin du service en même temps que j'apprends à vivre avec cette condition.

Je dois reprendre du service au ralenti pour y arriver et c'est extrêmement frustrant. Mais je recommence à fonctionner et cela me donne de l'espoir au futur. Car même si je dois accepter ce rythme ralenti, c'est toujours mieux que pas avoir de rythme du tout!

Pour ce faire, je dois intégrer la notion de "pacing" en mon travail et je déteste cela car cela me force à devoir revoir toute ma façon de travailler. Je dois apprendre à fonctionner autrement. Oublier mes habitudes d'antan et reconstruire de nouvelles façons de faire.

Le "pacing" c'est le mot magique du corps médical de la clinique de douleur. Le doc t'en parle, les physios t'en parlent, le psy t'en parle, bref tout le monde t'en parle là-bas! Le "pacing" signifie la gestion des activités et des énergies au cours d'une journée en douleur chronique.

Comme le résume le psy avec cette petite histoire qui m'a marquée:

- Il y a plusieurs façons de remplir un bain. Soit tu ouvres le robinet et tu laisses couler jusqu'à ce qu'il soit plein. Soit tu ouvres et tu fermes le robinet et même si tu y vas au goutte à goutte, le bain se remplira. Mais si tu restes à côté du bain à contempler son vide jamais il ne se remplira. Selon lui mieux vaut remplir son bain au compte goutte si nécessaire plutôt que se lamenter sur le fait que l'on ne peut plus se contenter d'ouvrir le robinet et de le remplir en un coup! 

Pas fou. Qu'en pensez-vous?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire