mercredi 8 avril 2015

Accepter ne veut pas dire se résigner...


Lorsque le neurologue m'a dit que mon nerf était foutu et que j'étais maintenant candidate à la clinique de la douleur. Ce pour quoi je devrais attendre longtemps. J'ai ressenti de réelles envies de meurtre, envie de l'étrangler sur place, envie de me pendre...

Sachant que je devrais attendre longtemps avant d'entrer à la fameuse clinique m'est venue l'idée d'aller aux groupes d'entraides de douleur. Je me suis dit que si la clinique à l'hôpital correspondait au scolaire, les groupes qui se déroulaient à l'hôpital correspondaient au parascolaire de la chose.

En ces groupes, j'ai fait la connaissance de Vincent, chercheur universitaire de son état, le seul à réellement travailler, le seul à continuer sa vie malgré des douleurs lombaires constantes et intenses, séquelles d'un accident de moto. Il a été le premier à me parler d'acceptation puis il a ajouté: "T'en fais pas de toute façon ça prend en moyenne 7 ans pour accepter les réalités de la douleur chronique". 

Cela faisait deux ans que je vivais avec la mienne et je me suis dit qu'il était hors de question que je vive en ces limbes où m'entraînait mon nerf facial dégradé encore 5 ans!

Alors j'ai commencé à essayer de comprendre ce concept. Deux ans plus tard, j'ai compris plein de choses. Ce ne fut pas facile. La dernière année a été particulièrement difficile intérieurement. Mais je comprends maintenant plein de choses que je ne comprenais pas les premières fois où j'ai mis les pieds aux groupes d'entraides.

Accepter = Se reconstruire avec la douleur

En fait je comprends tant de choses maintenant que cela me prendrait une douzaine de chapitres pour arriver expliquer tout ce que je comprends. Je brouillonne ici et là, premiers pas pour mettre de l'ordre en ces multiples compréhensions qui changent le sens de la vie.

Ce n'est pas la première fois que la vie me déconstruit mais c'est la première fois que je reconstruis avec autant de conscience et de compréhension. Un processus fascinant en soi. Un processus que je suis capable d'apprécier dans le recul que donne l'exercice de s'étirer les pensées. La neuroplasticité est un miracle en soi.

Comprendre aide à avancer. Comprendre aide à maîtriser les peurs et les angoisses. Comprendre ne résout rien en soi mais éclaire le tout.

Accepter le présent tel qu'il l'est, avec ses inconvénients et douleurs, est le premier pas pour avancer. Accepter ne veut pas dire capituler ou se résigner. Accepter veut dire affronter. Et c'est en affrontant qu'on avance.

Accepter que je me réveille chaque matin avec des douleurs faciales dégueulasses, des sensations effrayantes et des malaises différents m'aide à me lever. C'est ma réalité et je n'en contrôle pas la physiologie mais je peux en contrôler la psychologie. Ne pas accepter mon sort donne la chance au malheur de m'écraser. Et le malheur ne rate jamais une chance d'écraser sa proie. Mais je ne suis pas une proie facile.

Je bataille le malheur comme d'autres vont en guerre. Tant de fois il a essayé d'avoir ma peau. Il me fout un gros pain dans la gueule, il m'assomme, il me fout à terre mais dès que je reprends conscience, le visage en sang, je le regarde en face et je lui dis: "Fuck you!" Je me relève et je combats.

I'm a warrior of peace and love and i will die fighting. Even if it means that i will have to decide of my own death. One day i will die. I don't know when, i don't know how but i know that day will come. As it will come for all of us, for all of them, and for all of you.

J'avance vers ce jour, la tête haute, en me battant pour les droits du bonheur et de l'amour. J'avance en refusant la haine, la jalousie et toutes ces conneries qui font de la vie une déception. En quête de vérité et d'authenticité humaine, je mûris. Et si pour cela je dois accepter de vivre avec une moitié de visage en enfer, alors j'accepterai et j'apprendrai, aussi dur que cela soit.

Il y a certainement des jours où je veux hurler mais ces jours là, Miss Soleil m'aide à conjurer les hurlements. En cette épreuve physique cet enfant me donne force, volonté et compréhension. Elle m'offre ses cris et me donne le courage de lutter. Jour après jour. On a un truc elle et moi quand je suis à bout.

Je lui dis: "Je crois que j'ai besoin d'un cri". Je fais la grimace du cri, elle propulse le son. On fait la paire et on s'amuse du malheur sur nos têtes. On finit toujours par en rire. Cela allège une situation pourrie. Car je sais que ce nerf facial foutu affecte non seulement ma vie mais la sienne aussi. J'espère qu'en apprenant, je lui permets d'apprendre aussi.

Trouver la force au coeur de l'épreuve

Dernièrement, elle a commencé à me parler d'un texte qu'elle veut écrire sur cette maladie. Elle voudrait expliquer ce qu'elle vit et ce qu'elle comprend depuis qu'elle a 5 ans. Depuis qu'un virus en dormance s'est réveillé pour m'attaquer le nerf et me paralyser une moitié de visage.

Je ne peux que l'y encourager. Et continuer d'écrire sur mon propre cheminement. Laisser couler les mots comme coule ce long fleuve peu tranquille qui fait le cours de nos vies...

 Et si dans chaque épreuve humaine résidait en son cœur la force de la traverser? Et si le défi de chaque épreuve était de trouver ce puits intérieur où puiser la force d'en surmonter l'épreuve? Et ensuite garder avec soi cette force intérieure. Serait-ce si fou?

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